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Intervention en Conseil de paris - lundi 20 novembre 2017 Discussion sur le Plan Climat

Mise à jour le 21/11/2017
Intervention sur le Plan Climat
 Le Lundi 20 novembre 2017
Madame la Maire,
Mes chers collègues,
La COP 23 vient de s’achever à Bonn sans progrès notable pour la mise en œuvre de l’Accord de Paris. A rebours de l’urgence climatique, le dur des négociations a été renvoyé à la COP 24 de 2018. La sortie égoïste des Etats-Unis de l’Accord de Paris n’a fait qu’accroître la difficulté de limiter le réchauffement climatique en-dessous des deux degrés d’ici la fin de ce siècle.
Je dois dire que comme vous sans doute, le cri d’alarme lancé la semaine dernière par 15.000 scientifiques du monde entier nous a rappelé qu’au-delà de ce seuil, le dérèglement climatique sera irréversible. C’est dire combien la lutte contre le réchauffement climatique est la mère des batailles. Tendre vers la neutralité carbone ce n’est pas un objectif, c’est un devoir et c’est un devoir à partager, à partager me semble t-il autour des deux principes qui ont irrigués toutes les réflexions de la COP21 : le penser global et l’agir local.
Je dois dire Mme. la Maire qu’un certain nombre de décisions que vous avez pris ces derniers mois me paraissent en totale contradiction avec ce penser local et agir global à l’instar de la centralisation du projet de décentralisation de la Caisse des écoles qui aurait conduit purement et simplement à mettre un terme aux filières courtes et durables, à l’instar, aussi j’ose le dire, de la suppression pure et simple de la circulation de la voie Pompidou sans aucun accompagnement. Je dois dire que j’attends avec beaucoup d’impatience le rapport du Professeur Carlier sur les conséquences de cette décision qui me parait un peu inconséquente.
Les parisiens payent déjà un lourd tribut sur le terrain du réchauffement climatique, 6 mois d’espérance de vie en moins, des pics de décès liés aux canicules estivales, l’aggravation des pathologies liées à la pollution, en particulier chez les populations les plus fragiles. Je pense aux enfants, je pense aux personnes âgées et aux femmes enceintes. Nous devons donc agir et nous devons agir ensemble et vite, et sur ce point là je suis d’accord avec vous.
Pour autant, disons le franchement, 80% des émissions de carbone échappent aux décisions de notre assemblée. C’est pourquoi nous devons aborder donc nos débats de cet après-midi avec beaucoup d’humilité. Hélas, la communication autour de ce Plan Climat manque de modestie, loin d’ailleurs de la tonalité de ses travaux préparatoires. Car vous sacrifiez souvent à la complexité des enjeux le simplisme du calcul politique.
Je voudrais revenir sur cette affaire de voiture. Paris crée ses richesses grâce au million de personnes qui viennent y travailler chaque jour. Ce n’est pas par choix qu’ils prennent leur voiture, et qu’ils perdent 64h par an bloqués dans les embouteillages. La question n’est donc pas de savoir si on supprime les voitures – qui sont des voitures sales, à moteur thermiques et qu’il faut les éradiquer – mais c’est comment on prépare l’arrivée des voitures propres. Et là, le plan manque de clarté. Vous nous dites qu’il n’y aura plus de véhicules thermiques à Paris en 2030. Chiche, mais où est le programme d’installation des bornes électriques, où sont les parkings qui vont permettre d’accueillir ces voitures propres ? Car il va bien falloir les accueillir dans des parkings si vous ne les voulez pas en surface. Où est le bon dimensionnement du réseau parisien électrique qui aujourd’hui ne permettrait d’alimenter que 20% des véhicules ?
A cela s’ajoute un problème de cohérence et de crédibilité des trajectoires. Un seul exemple : le bilan carbone 2014 fait état d’une réduction de 9,2 % des émissions de gaz à effet de serre depuis le premier bilan carbone de 2004. Vous proposez moins 25 % ces émissions en 2020 alors que c’est hors de portée. Il suffit de voir l’évolution de la courbe. Sans vergogne, vous nous annoncez vouloir atteindre en 2030 une réduction de 50 % de ces émissions.
La parole publique a déjà trop souffert de ces discours incantatoires sans lendemain. L’accumulation de mots clefs ne suffit pas à bâtir une vision et à tracer un chemin. « Conscientiser », c’est bien, mais cela ne fait pas reculer les émissions de carbone. Quand ce discours politique se double de résultats à l’exact opposé des annonces (je fais allusion au plus 15% d’émission de carbone sur les voies de la voies Georges Pompidou), il perd le peu crédibilité qu’il lui reste. En matière de lutte contre le réchauffement climatique, l’exemplarité est primordiale pour susciter l’adhésion de tous. L’incapacité des pouvoirs publics à respecter les engagements pris est dramatiquement démobilisatrice pour les autres acteurs et la société civile.
Or, la collectivité parisienne, sous votre impulsion, Madame la Maire, est loin d’être irréprochable. Vous dites aux Parisiens que les véhicules Diesel tuent. Chacun pourrait penser que la Ville de Paris, forte de ce constat, n’y ait plus recours. Or, nous sommes encore loin de la sortie du Diesel pour le parc municipal. Plus d’une benne à ordure sur trois, 35 % exactement, roule encore au gazole. « Faites ce que je dis, pas ce que je fais », dans la mesure où les prestataires de la collectes ont interdiction de recourir à des motorisations Diesel depuis 2014. Plus grave encore, la part du gazole dans les consommations de carburant progresse fortement. Le bilan annuel du Plan Climat ne le cache pas : le gazole représentait 30 % des consommations de carburants en 2006 et 48 % en 2016. Cette tendance est tellement contradictoire avec vos prises de position que j’ai cru à une erreur. Mais les chiffres, eux, ne mentent pas.
Conscient des enjeux et face à ce bilan, mon groupe a choisi de prendre ses responsabilités. Nous avons déposé des propositions concrètes, utiles et financées. Preuve, s’il en fallait, que ce sujet ne peut être l’otage de clivages artificiels.
Pour permettre aux Parisiens de suivre le respect des orientations du Plan climat et d’apprécier l’évolution de la trajectoire de réduction des émissions de carbone, nous souhaitons qu’un tableau de bord soit aisément disponible sur le site paris.fr. Plus facilement accessible que les documents actuels, cet outil montrera les mesures engagées, leur niveau de réalisation et les financements mobilisés. La baisse attendue des émissions aura alors un effet mobilisateur pour l’ensemble des acteurs parisiens.
Plusieurs amendements tiennent à assurer une exemplarité nouvelle de la Ville de Paris. Ainsi, nous vous proposons de respecter le calendrier de sortie des véhicules Diesel et essence avec 5 ans d’avance, soit respectivement en 2019 et 2025. Les nouveaux bâtiments municipaux devront démontrer que la neutralité carbone peut être une réalité, tout en tenant compte des contraintes actuelles. Par souci de transparence, nous souhaitons afficher sur chaque bâtiment municipal sa classe d’émissions de CO2. Vous souhaitez que l’ensemble des logements privés soient rénovés d’ici 2050. Or, au rythme actuel, le parc social ne sera intégralement réhabilité qu’à l’horizon 2061. Nous vous proposons de mobiliser une partie du compte foncier pour doubler l’effort et achever la rénovation thermique de l’ensemble des logements sociaux dès 2035.
Nous souhaitons également pérenniser le comité de suivi des voies sur berges, conformément à votre engagement de juillet dernier. Ces mêmes aménagements de voirie devront s’attacher à désimperméabiliser les sols, notamment sur les places parisiennes. La Place de la République rénovée, très minérale et laissant peu de place à l’eau, n’est tout simplement pas compatible avec le Plan Climat. Le réaménagement des 7 places, malgré un dérapage budgétaire de 50%, ne prend pas suffisamment en compte cet impératif. Je considère la place du Panthéon à part car il semblerait que ce projet soit repoussé.
Pour financer la transition énergétique, nous devons trouver des ressources nouvelles. En appliquant le principe de pollueur/payeur aux 70.000 poids-lourds qui empruntent le périphérique chaque jour, l’écotaxe permettrait de dégager 18 M€ de recettes par an. La Présidente du Conseil régional est prête à avancer sur ce type de mesures.
De nombreux Parisiens sont conscients de la pollution qui les entoure, mais peu d’entre eux sont aujourd’hui en mesure de dire si leur organisme souffre de cette exposition chronique. Aussi, il nous a semblé indispensable de proposer un pass « Respire Poumons » permettant aux populations à risques, comme les enfants, les femmes enceintes et les personnes âges, de consulter un spécialiste, dans l’un des centres de santé de la Ville.
Par ailleurs, nous souhaitons que les temps d’animation périscolaire comprennent un volet de sensibilisation aux gestes citoyens, comme la lutte contre les gaspillages ou encore le tri des déchets.
Chacun l’aura donc compris, nous souhaitons la réussite de ce Plan Climat et l’atteinte de ses objectifs. Nous n’avons pas le choix, parce qu’il n’y a pas d’autre horizon pour la survie de notre planète. Seule une transition rapide vers une économie bas-carbone nous éloignera du précipice climatique. Nous serons donc attentifs à ce que les nombreuses propositions que nous avons déposées soient intégrées au plan climat. Non pas par souci de reconnaissance, mais parce que nous les estimons, en toute sincérité et humilité, utiles à son succès.
Je vous remercie.
Florence BERTHOUT
Maire du Ve arrondissement
Conseillère régionale d’Île-de-France
Présidente du groupe Les Républicains au Conseil de Paris

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